Quelles sont les principales études relatives à la cigarette électronique comme moyen de sortie du tabagisme ?
Début avril 2024, l’association Sovape était auditionnée par la Commission des affaires sociales du Sénat. L’occasion de présenter son analyse sur la politique antitabac française et de proposer des pistes pour sortir de l’impasse. Ici, nous vous proposons de prendre connaissance du rapport détaillé point par point que l’association a fait parvenir au Sénat.
Précédemment nous mettions en avant le premier point de l’analyse avancée par l’association : Pourquoi le taux de prévalence tabagique se maintient-il à un niveau élevé en France ? Continuons par le second point. Les propos énoncés ici sont ceux de l’association. Vous pouvez retrouver l’intégralité de leur contribution ici.
Quelles sont les principales études et méta-études relatives à la cigarette électronique comme moyen de sortie du tabagisme depuis 2000 ?
Il existe deux types d’études sur le sujet. Les essais cliniques permettent une comparaison précise entre des moyens d’arrêter de fumer en suivant des groupes randomisés. Les conditions créées par les chercheurs peuvent cependant avoir des effets qui seraient différents dans le monde réel. Les études en populations ont l’avantage de mesurer les effets réels se déroulant, mais peuvent être sensibles à des facteurs de confusion mal pris en compte. Dans le cas du vapotage comme outil d’arrêt tabagique, les deux types d’études semblent indiquer avec un haut niveau de certitude l’efficacité du vapotage pour arrêter de fumer. Dans un récent éditorial pour le NewEngland Journal of Medicine (NEJM) accompagnant une nouvelle étude montrant l’efficacité du vapotage pour l’arrêt tabagique, la Pr Nancy Rigotti, Harvard Medical School, souligne que la question de son efficacité est résolue, reste à affiner les meilleures conditions pour soutenir le plus efficacement et le plus possible de fumeurs à sortir du tabagisme à l’aide du vapotage.
Études cliniques
La revue d’études cliniques de Cochrane synthétise l’état des connaissances sur l’efficacité du vapotage pour l’arrêt tabagique. Sa rigueur scientifique reconnue et ses mises à jour régulières en font le meilleur outil actuel pour cette évaluation. La mise à jour du 8 janvier 2024, analysant 88 études cliniques sur le sujet, établit avec un « haut niveau de certitude » que le vapotage avec nicotine est 1,59 fois plus efficace que les substituts nicotiniques (gommes et patchs) pour arrêter de fumer. Les effets secondaires des deux aides semblent d’être de niveau similaire (OR 1,03) avec un niveau de preuve modéré. Les références des 88 études se trouvent dans la revue Cochrane.
Cochrane a également procédé à une comparaison plus large des données sur les différents moyens d’arrêt tabagique en 2023 (qui ne comprend donc pas les publications des derniers mois). Le vapotage avec nicotine (nicotine EC) apparaît dans les études cliniques comme le moyen le plus efficace pour arrêter de fumer, un peu au-dessus du Champix (Varénicline) et de la Cytisine (Tabex).
Cependant, dans le contexte français, ces deux médicaments ne sont pas disponibles : Pfizer a cessé de distribuer le Champix en 2020, tandis que la Cytisine n’a jamais été homologuée par l’ANSM, en dépit de 60 ans de recul et d’études internationales concluantes sur son efficacité et sa relative sécurité. En l’état, les fumeurs français n’ont que le vapotage comme aide efficace à disposition pour tenter de cesser de fumer, ou les substituts nicotiniques avec un niveau d’efficacité moindre.
Outre les études cliniques, les données en population confirment que le vapotage est une aide majeure utilisée pour arrêter de fumer.
Le baromètre 2022 de Santé publique France (SPF) montre que 4,4 % des Français ont cessé de fumer en ayant utilisé le vapotage, dont près de la moitié (2,1 %) ont également arrêté de vapoter.
Dans le Baromètre santé 2017 publié par SPF, 870 000 ex-fumeurs déclarent que la vape les a aidé à arrêter de fumer (dont 700 000 ex-fumeurs depuis au moins 6 mois). En 2017, SPF avait également évalué les aides utilisées lors des tentatives d’arrêt tabagique en France : derrière les tentatives franches (sans aide– qui concerne près de la moitié des tentatives), le vapotage apparaissait comme le moyen le plus populaire d’aide à l’arrêt (26 % des tentatives avec son aide).
Cependant, il n’existe pas à notre connaissance d’évaluation plus récente de ce point essentiel pour piloter une politique sur le tabac. Il est possible que la dégradation de la situation sur le tabagisme en France suite au changement de politique des autorités de santé depuis 2019, passant d’une ouverture à la réduction des risques à une hostilité grandissante à son encontre, fasse que ce taux de recours au vapotage pour arrêter de fumer ait évolué.
Les données des baromètres de Santé publique France montrent une baisse de 5,4 points de pourcentage de la prévalence du tabagisme quotidien entre 2016 et 2019, accompagné d’une hausse de 1,9 point de l’usage quotidien du vapotage et d’une hausse de 1,2 point des ex-fumeurs ex-vapoteurs. Cette période est la seule à avoir connu une chute significative du taux de fumeurs en France durant le 21ᵉ siècle.
L’Institut national français de la santé et de la recherche médicale (INSERM) avait déjà constaté que « l’utilisation de la cigarette électronique était associée à la réduction du tabagisme et à la tentative d’arrêt du tabac pour les personnes qui l’ont utilisée pendant moins d’un an » notant que « des avantages supplémentaires sont attendus avec une durée d’utilisation plus longue ».
Dans un souci d’initier et d’évaluer l’efficacité du vapotage avec un soutien par les pairs pour arrêter de fumer, SOVAPE a mené une enquête auprès des membres du groupe Facebook d’autosupport « Les Vapoteurs #MoisSansTabac » initié par Santé publique France à l’occasion du Mois Sans Tabac 2017. Il en résulte que 38 % des participants étaient devenus non-fumeurs à 5 mois, soit environ 10 fois plus de chance d’arrêter qu’avec un arrêt franc sans aucune aide.
Au Royaume-Uni, l’agence de Santé publique anglaise Office for Health Improvment and Disparities (OHID, ex-Public Health England), estime dans son 8ᵉ rapport annuel sur le vapotage en 2022 que la performance d’arrêt du tabac dans les Stop Smoking Services avec la vape (avec donc un accompagnement de soutien) atteint entre 55 et 78 % de réussite.
Selon l’Eurobaromètre 2021 publié par la Commission européenne, 30 % des Européens qui ont essayé le vapotage ont réussi à arrêter de fumer, tandis que 27 % ont réduit leur consommation de tabac.
Une récente analyse épidémiologique américaine, publiée en 2024 dans la revue Nicotine and Tobacco Research de la SRNT, montre que les fumeurs utilisant le vapotage ont été en proportion significativement plus à arrêter de fumer que les fumeurs n’utilisant pas le vapotage entre 2013 et 2022.