Quelles sont les principales études relatives aux risques sanitaires de la cigarette électronique ?
Début avril 2024, l’association Sovape était auditionnée par la Commission des affaires sociales du Sénat. L’occasion de présenter son analyse sur la politique antitabac française et de proposer des pistes pour sortir de l’impasse. Ici, nous vous proposons de prendre connaissance du rapport détaillé point par point que l’association a fait parvenir au Sénat.
Précédemment nous mettions en avant les premiers points de l’analyse fournie par l’association :
Pourquoi le taux de prévalence tabagique se maintient-il à un niveau élevé en France ?
Continuons par le quatrième point. Nous rappelons que les propos énoncés ici sont tirés de la contribution apportée devant le Sénat par l’association Sovape. Vous pouvez retrouver l’intégralité de leur contribution ici.
Quelles sont les principales études et méta-études, depuis le début des années 2000, relatives aux risques sanitaires de la cigarette électronique ?
Le travail le plus complet et à jour relatif au risque du vapotage a été réalisé par Public Health England. Sur la base de faits, ils évaluent à 95% minimum la réduction des risques du vapotage vs tabagisme.
Indéniablement, la série de documents de référence est constituée par les huit rapports annuels de l’Office for Health Improvment and Disparities (OHID, ex-Public Health England) rédigés de 2015 à 2022. Ils présentent la revue de littérature scientifique la plus complète, mise à jour régulièrement, avec des analyses équilibrées et pointues dans une perspective de lutte contre le fléau du tabagisme. Ces rapports britanniques s’appuient sur un solide corps de chercheurs locaux et une boussole en matière de stratégie de lutte antitabac offerte par les rapports du Royal College of Physicians. Cet ensemble et son suivi dans le temps lui procurent une grande cohérence et rigueur.
En ceci, le corpus présenté par les autorités britanniques est largement supérieur à l’unique rapport de l’Académie des Sciences Américaine, datant de 2018, dont le contenu est très inégal. Riche sur certains points, il est inabouti, brouillon, voire parfois biaisé sur d’autres aspects.
En France malheureusement, de l’aveu même de François Alla, son principal rédacteur dans une interview au Quotidien du Médecin, le rapport du HCSP a été bâclé dans des conditions de travail indignes de l’importance du sujet. La bibliographie contient des études rétractées, qui n’auraient en aucun cas dû être prises en compte, et comporte des lacunes majeures. Certains arguments s’appuient sur des données fictives sur les risques relatifs, nourrissant un raisonnement purement imaginé par les rédacteurs, quelque chose qui s’apparente plus à de la science-fiction qu’à la science rigoureuse basée sur les faits. Comme de nombreux chercheurs et organisations du domaine des addictions le réclament, le HCSP devrait rétracter ce rapport immédiatement pour le reprendre avec les moyens indispensables au sérieux et la rigueur d’un document crucial pour la santé publique.
Le vapotage est un outil de réduction et de suppression des risques
Lorsqu’il conduit à l’arrêt du tabac, le vapotage est un outil de suppression du risque tabagique. Lorsqu’il est suivi d’un arrêt du vapotage, la question de la réduction des risques ne se pose plus du tout. Selon le baromètre santé de Santé publique France, il y a approximativement autant d’ex-fumeurs actuellement vapoteurs que d’ex-fumeurs qui ont aussi cessé de vapoter.
Lorsque le vapotage est adopté en tant qu’alternative au tabagisme accompagné d’un sevrage complet, il supprime de facto les méfaits du tabagisme. En l’absence de combustion, il supprime ou réduit drastiquement les risques associés à l’inhalation de particules solides, de monoxyde de carbone et de la plupart des nombreuses substances cancérigènes identifiées dans la fumée de cigarette et absentes de l’aérosol produit par la vapoteuse.
Selon l’INCA, « Les cancers liés au tabac sont dus à de nombreuses substances cancérigènes (benzène, l’arsenic, le chrome, etc.), tandis que le monoxyde de carbone et les particules fines produits par la fumée sont les principaux responsables des maladies cardiovasculaires et que les particules solides présentes dans cette fumée jouent un rôle important dans la survenue d’une insuffisance respiratoire. Ces produits n’existent pas à des taux significatifs dans la “vapeur” des e-cigarettes. »
Sur les 7000 composés de la fumée de cigarette, plus de 6900 sont totalement absents de l’aérosol de vapotage. Le niveau des toxiques encore présents dans le vapotage est réduit d’au moins 95 % par rapport à la fumée de cigarette. C’est la raison pour laquelle les auteurs du rapport scientifique annuel pour le gouvernement anglais ont évalué que le risque de vapoter est dans une fourchette d’au moins 95 % de réduction des risques par rapport à fumer.
« L’estimation selon laquelle vapoter est environ 95 % plus sûr que fumer est basé sur les faits suivants :
- Les substances nocives présentes dans la fumée de cigarette– y compris carcinogènes sont absentes du vapotage ou, si elles sont présentes, elles le sont à des niveaux bien inférieurs à 5 % de ceux de la fumée de tabac (le plus souvent inférieurs à 1 % et bien en deçà des limites de sécurité pour l’exposition professionnelle) ;
- Les principales substances chimiques présentes dans les e-cigarettes n’ont pas été associées à un risque sérieux ».
Public Health England, Underpinning evidence for the estimate that e-cigarette use is around 95% safer than smoking: authors’ note, 2015.
Cette évaluation scientifique est toujours valable, les études toxicologiques plus récentes ayant confirmé ces ordres de grandeur. Notamment, celle de l’Institut Pasteur Lille qui a analysé les émissions de tabac/tabac chauffé/trois dispositifs de vapotage. Elle démontre que le vapotage réduit de 99,8 % des carbonyles et jusqu’à 99,2 % des hydrocarbures aromatiques polycycliques par rapport à la fumée de tabac, davantage que le tabac chauffé. L’institut appelle néanmoins à la prudence avant d’extrapoler une réduction des méfaits proportionnelle à la réduction des émissions.
Il n’est pas inutile de citer le travail exceptionnel de chercheurs publics intitulé « Balancing Consideration of the Risks and Benefits of E-Cigarettes » dans la revue américaine AJPH en septembre 2022. Ces travaux avec très grande objectivité font le point sur l’état de la recherche concernant les produits de la vape.
À cet effet, les auteurs soulignent que : « De nombreux scientifiques ont conclu que le vapotage est probablement nettement moins dangereux que le tabagisme pour les raisons suivantes :
- Le nombre de produits chimiques dans la fumée de cigarette, supérieur à 7000, dépasse celui de l’aérosol de cigarette électronique de 2 ordres de grandeur.
- Parmi les substances potentiellement toxiques communes aux deux produits, la fumée de cigarette contient généralement des quantités nettement plus importantes que l’aérosol de cigarette électronique. Cependant, l’aérosol de cigarette électronique contient certaines substances qui ne se trouvent pas dans la fumée de cigarette.
- Les biomarqueurs reflétant l’exposition à des substances toxiques sont présents à des niveaux beaucoup plus élevés chez les fumeurs exclusifs de cigarettes que chez les vapoteurs exclusifs, et les études sur les fumeurs qui passent aux cigarettes électroniques ont révélé une diminution des expositions aux substances toxiques.
- Les tests de la fonction pulmonaire et vasculaire indiquent une amélioration chez les fumeurs de cigarettes qui passent aux cigarettes électroniques. Les utilisateurs exclusifs de cigarettes électroniques (la plupart étant d’anciens fumeurs) signalent moins de symptômes respiratoires que les fumeurs de cigarettes et les doubles utilisateurs. Cependant, des questions demeurent. Les recherches en cours permettront de mieux comprendre les dangers absolus et relatifs des produits. »
Il est impossible d’affirmer que le vapotage est dénué de risques. Les substituts nicotiniques ne sont pas non plus inoffensifs, les notices d’utilisation signalent de nombreux effets secondaires possibles, et pas seulement liés à la présence de nicotine. L’innocuité totale n’est scientifiquement pas démontrable, pour le vapotage comme pour tout autre produit de consommation, comme pour eux, la normalisation est centrale pour la sécurité des consommateurs.